J'ai rencontré quintescent dans le désert de Libye, pendant une mission "non officielle" à la frontière du Tchad.

J'avais dû m'éjecter en plein désert.

Carafe moteur.

Je ne sais pas ce qui a pu se produire, une explosion, et puis un incendie.

Les commandes qui ne répondent plus, les instruments complètement aux choux.

Le GPS de mon Jaguar m'indiquait que j'étais plus ou moins au dessus de la Normandie, mais si je voyais la plage, je ne savais pas où la mer était passée.

Je m'étais éjecté tout près du sol, et mon parachute avait à peine eu le temps de s'ouvrir.

Finalement, je m'en étais plutôt bien tiré, sauf que j'avais atterri en plein sur un rocher imbécile et néanmoins libyen (du moins, je le supposais).

Je m'étais légèrement foulé une cheville, mais je m'estimais plutôt heureux.

Surtout que le Jaguar avait explosé presque immédiatement après mon éjection.

Incroyablement, aucun éclat ne m'avait atteint, le parachute non plus.

L'avantage du désert, c'est que le sable absorbe le carburant, et que les débris ne brûlent pas très longtemps, ce qui permet d'éviter de se faire repérer en territoire "hostile".

L'inconvénient, c'était qu'avec mes instruments déréglés, il n'allait pas être très facile aux secours de me retrouver.

Je n'avais presque pas d'eau, mais en revanche, du sable et des cailloux autant que je voulais.

Finalement, le me demandais si le mieux qui pouvait m'arriver, ce n'était pas de tomber sur une patrouille libyenne.

Si je n'étais pas liquidé sur place, les diplomates pourraient faire leur travail, et je pourrais sortir deux ou trois ans (et quelques dessous de table) plus tard.

A moi le couscous aux frais de Khadafi !

En attendant, j'avais passé la journée en m'abritant du soleil du mieux possible sous un débris d'aile.

A part le manque d'eau, si je m'efforçais de ne pas bouger, ça restait supportable.

La nuit est tombée.

Le moindre bruit de vent ou d'insecte me faisait sursauter.

Et soudain, il était là.

Quintescent.

Un gamin, blondinet.

Je me dis brièvement que c'était bizarre, un niard blond dans le coin.

En plus, je ne parlais pas le langage indigène, ça n'allait pas être facile de communiquer.

Mais c'est lui qui a entamé la conversation, en français.

"S'il vous plait, monsieur, dessine-moi un mouton".

Je n'ai pas relevé la faute de grammaire grossière, comme Ludine l'aurait fait.

Faisant preuve d'une patience qui m'étonne encore moi-même, j'ai même évité de lui demander s'il en avait d'autres, des questions à la con de ce genre.

J'ai éludé la question en disant que je n'avais pas mon carnet de croquis sur moi.

Mais il avait amené de grands blocs de papier et des fusains, ce con, et il insistait.

Je n'osais pas trop le rabrouer, parce que je me méfiais de ses réactions.

Je ne savais pas s'il y en avait d'autres comme lui.

Il m'a raconté une histoire bizarre de volcans, de roses et de réverbères.

J'ai essayé de lui inculquer les rudiments de l'électricité, mais il insistait avec son histoire d'éclairage au gaz.

J'ai fini par laisser tomber.

Je lui ai demandé de me montrer ses roses, me disant que là où il y avait des roses, il devait y avoir de la flotte.

A ce moment-là, c'était tout ce qui me préoccupait.

Je n'avais plus les idées très claires, il me parlait de volcans.

Il me semblait avoir vu des volcans, juste avant mon éjection.

De l'eau, près du volcan...

Je suis tombé dans les pommes.

J'ai été réveillé par un sergent de la légion étrangère, qui parlait avec un fort accent slave.

"Mon capitaine, est-ce vous entendez ?

- A boire ! " C'est tout ce que j'ai pu répondre.

J'ai entendu un médecin militaire dire que je délirais.

Et je suis parti à nouveau.