Moi, j'ai connu quintescent sur un tournage de film X.

A l'époque, je commençais à avoir une petite notoriété dans ce milieu (même si dans ce domaine-là, les filles sont beaucoup plus connues et mieux payées que les mecs).

J'avais déjà une demi-douzaine de films à mon actif. C'était déjà pas mal, car on n'en tournait qu'un ou deux par mois.
A l'époque, les acteurs ne recouraient pas systématiquement recours à la cocaïne, et le Viagra n'existait même pas.
Le SIDA, on n'y pensait guère.
On avait tout de même quelques trucs pour proposer une prestation honorable presque à tous les coups.
Les gars étaient des professionnels, et les budgets étaient minuscules.
Les tournages étaient dans la boîte en quelques heures, et on ne pouvait pas attendre tranquillement que les acteurs se mettent en forme.
C'était très particulier comme boulot, mais considérait ça vraiment comme un boulot à part entière.

On avait tous un pseudo, vaguement américain, ou inspiré du nom d'acteurs américains.
Moi, on me l'avait choisi un dimanche, et il y avait la série Magnum qui passait à la télé.
Alors je m'appelais Tom Sellaqueue.
Ouais, on n'avait pas une imagination débordante, mais on exprimait exactement ce qu'on avait à dire.
Comme dans le boulot.

C'était une vie facile, et très bien payée.
Evidemment, il fallait consentir quelques sacrifices, en particulier rester en forme et surveiller son poids, pour rester présentable sur la pellicule.

A cette époque, quintescent était déjà une star, dans le milieu.

A côté des tournages proprement dits, les producteurs organisaient des événements exceptionnels, pour entretenir notre "légende", c'est à dire l'intérêt commercial du public.
C'étaient des soirées "spéciales", avec des invités V.I.P. triés sur le volet, venus s'encanailler et brouiller leur image, et des journalistes spécialisés.

Dans cet exercice, quintescent était toujours le meilleur.
Il avait gagné le surnom de "geyser islandais", sans avoir, naturellement, jamais mis le moindre orteil en Islande.
Il était capable de performances et d'une endurance incroyables.
Il pouvait demander à son corps - et particulièrement à sa langue - des exploits et des contorsions inimaginables.

Je me rappelle encore le jour où mon producteur m'a annoncé que j'allais avoir un tournage avec quintescent.
Pour moi, ça signifiait que j'allais enfin "jouer dans la cour des grands", être reconnu comme un professionnel de haut niveau, et être contacté pour des productions dans le monde entier.
Et surtout rencontrer le mythe, essayer d'en apprendre un maximum avec lui.

Nous avons été présentés dans le bureau du producteur, avec les autres acteurs de l'équipe du film.
Je me suis retenu de lui demander un autographe, je ne suis quand même pas une putain de groupie, putain !
Mais je n'arrivais plus à effacer mon sourire banane jusqu'aux oreilles.

Il a été très sympa, on voulait tous dîner ensemble, mais le producteur a refusé tout net: on devait rester en forme pour le lendemain.
On a quand même pu échanger deux trois mots.

Je lui ai bien-sûr demandé s'il avait quelques trucs ou quelques conseils pour un jeune collègue débutant.
Il a éclaté de rire, affirmé que bien sûr, il avait un "gros" secret: rester soi-même et avoir confiance en soi.
Voilà le secret d'une carrière réussie.

Ca n'a l'air de rien, mais j'ai gardé cette leçon en mémoire à chaque fois que j'ai travaillé, et tout s'est toujours bien passé.

Aujourd'hui, j'ai quelques "petits soucis de santé", ma carrière est terminée, mais j'applique toujours cette précieuse philosophie pour ce qu'il me reste à vivre.