En attendant la mission
Par quintescent, mercredi 14 mars 2007 à 19:31 :: La chasse au blogueur :: #150 :: rss
Il est dit que la reine envoya ses armées à la garde des portes. Et que les portes étaient dispersées dans tout le royaume. Et que le souvenir en était oublié des hommes.Et que de seules les bibliothèques royales conservaient la trace de leur emplacement.
L'annonce de la reine avait atterré les invités.
Malgré les tables croulant sous les victuailles, et malgré le talent et la virtuosité des cuisiniers de la cour, le dîner, auquel on faisait honneur par déférence envers la reine ne suscitait plus guère d'enthousiasme, à l'exception d'Ar Valafenn, dont la gourmandise était aussi légendaire qu'imperturbable.
Son appétit réjouissant était le seul spectacle qui parvenait à arracher un sourire indulgent aux plus inquiets.
La reine avait interrompu son discours pour inviter les convives à partager sa table.
Selon l'usage en vigueur à la cour, qui résultaient de prescriptions religieuses très anciennes, les cérémonies protocolaires se poursuivaient pendant le repas.
La reine se préparait à distribuer les missions aux chefs de ses armées, réunis de toutes les provinces.
Ph&-no chipottait ce qu'on lui avait servi, qu'elle adorait d'habitude.
Mais cette fois, elle avait conscience que l'heure de grandes oeuvres était arrivée, et elle pensait à sa pauvre "Danse des Sept Voiles" blessée au port.
Voilà que l'opportunité de sa vie s'apprêtait à lui être proposée, et elle se retrouvait hors d'état d'en assumer la responsabilité.
Elle en aurait pleuré.
La Danse des sept voiles était assez modeste, en comparaison de beaucoup de navires de guerre de la flotte, mais son ancienneté et son expérience la vouait à un commandement majeur, qu'elle briguait depuis l'obtention de son brevet de la marine royale.
Et jusqu'à ce dernier voyage, ses états de service n'étaient qu'une suite ininterrompue d'éloges de la part de ses supérieurs.
Elle se savait promise à la plus brillante des carrières.
Elle attendait l'appel de son nom dans une certaine inquiétude, anticipant l'instant d'humiliation où elle serait obligée de décliner la demande de la souveraine.
Cependant, un détail l'étonnait: Les princes rassemblés étaient si nombreux qu'il était impossible de les faire défiler tous devant la reine pour leur attribuer à chacun une mission, comme il était d'usage au début d'une campagne.
Elle comprit qu'au lieu de cela, on convoquait devant la reine les princes de plus haut rang protocolaire, en leur donnant la charge d'attribuer à chacun la responsabilité et l'organisation de la défense d'une des portes, en attribuant à leur discrétion des fonctions à leurs vassaux.
Ph&-no ne savait pas que la reine avait été très réticente à cette solution, qui était certes scrupuleusement respectueuse de l'inamovible étiquette protocolaire, mais dont elle savait qu'elle était une cause d'irrémédiable enlisement bureaucratique, les attributions de responsabilités se faisant davantage au gré d'intérêts politiques et d'alliances qu'en fonction de critères stratégiques et tactiques.
Elle avait donc consenti à procéder ainsi que le protocole l'exigeait, et que les ministres le conseillaient, mais d'envoyer en mission secrète quelques personnes de confiance, auxquelles elle confierait la véritable mission de protéger le royaume des attaques des forces démoniaques.
Ainsi, le banquet était destiné d'une part à éveiller la vigilance de tous les sujets, et d'autre part à satisfaire l'orgueil et la vanité de la cour.
Ignorante de ce calcul, où elle tenait une certaine place, Ph&-no se morfondait en voyant s'éloigner l'opportunité d'aventures et de gloires auxquelles elle aspirait.
Commentaires
1. Le jeudi 15 mars 2007 à 08:35, par ph&-no
2. Le jeudi 15 mars 2007 à 17:31, par ph&-no
3. Le jeudi 15 mars 2007 à 17:32, par p
4. Le jeudi 15 mars 2007 à 19:04, par Clandestina
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